La naissance des cris de joie

Illustration Molly

Autrefois, il y a très longtemps, les filles et les garçons étaient très sages. Ils étaient tous très gentils et travaillaient bien à l’école. Ils ne savaient pas faire de bêtises. Il ne leur arrivait jamais de dire un mot plus haut que l’autre.

Souvent, les parents se disaient en cachette de leurs enfants, qu’ils étaient vraiment très sages et que leur maison était bien calme… parfois même, les papas et les mamans avaient l’impression qu’il leur manquait quelque chose, mais sans imaginer quoi. En ce temps-là, les animaux et les humains ne perdaient pas de temps à essayer de se parler. Ils vivaient dans deux mondes bien séparés et tous pensaient que c’était bien comme ça. Surtout les grenouilles ! Elles se méfiaient des petits humains qui, sans crier gare, sur le chemin de l’école, marchaient en sautillant et parfois même, sans le faire exprès, les aplatissaient. C’était quelque chose qui les mettait de très mauvaise humeur. Personne n’aime se retrouver avec des fesses toutes plates !

Mais un jour de printemps, il y eut de très grosses averses. Les enfants avaient alors sagement tous demandé l’autorisation de s’équiper pour aller dans les flaques d’eau. Ils étaient tous en bottes de caoutchouc à faire des grands splachs, quand la reine des grenouilles qui vivait dans une mare juste à côté, après les avoir regardés un bon moment en pensant à ses fesses, vint leur dire :

– Ça ne va pas de ne pas crier comme ça ! Vous vous croyez où ?
– Nous sommes dans une flaque d’eau, répliqua Martine, une petite fille très sage.
– Et donc ? hurla la reine des grenouilles.
– Nous avons bien fait de mettre nos bottes, répondit Quentin, un petit garçon très poli.
– Ce n’est pas la bonne réponse !

 

Les enfants avaient la tête qu’on fait quand on ne comprend plus rien du tout. C’est un genre de grimace, avec la bouche ouverte et les yeux écarquillés. La grenouille leur dit encore :

– Pourquoi vous ne criez pas ?
– On ne veut pas déranger ! répondirent doucement tous les enfants.

Elle se gratta la tête. Elle n’osait pas s’approcher d’eux. Elle pensait toujours à ses fesses et se demandait comment elle pourrait expliquer son problème. Déjà, ils recommençaient à faire des grands splachs toujours sans dire un mot plus haut que l’autre. Quand tout à coup, ils s’arrêtèrent, car des pierres avaient roulé en coinçant leurs bottes. Le plus étrange c’est qu’il ne se passait rien. Les enfants attendaient sagement de l’aide. Alors, la reine des grenouilles qui était aussi une maman s’inquiéta :

– vous avez de la chance que je vous ai vus !
–  Vous n’avez pas crié ?
– oh non, on ne veut pas déranger !
– Mais les cris ça prévient dit la grenouille qui prit son élan, se recula prudemment toujours pour protéger ses fesses et fit quelques vocalises très fort, si fort que des dizaines de grenouilles vertes accoururent avec leurs amis. Il y avait des mésanges, des lapins, des libellules, etc. Tous étaient contents de se retrouver pour donner un coup de main. Mais, voilà ! Pour dégager les gros cailloux, il fallait de la force. Heureusement, l’âne Martin passait au loin. Alors toutes les grenouilles coassèrent, toutes les mésanges zinzinulèrent, tous les lapins glapirent et les libellules froufroutèrent et quand Martin les entendit il s’approcha ! Tous lui demandèrent de bien vouloir soulever les pierres pour libérer les enfants. L’âne accepta à une condition. Il voulait qu’on lui donne du baume au coeur. Ce qui est bien normal.

 

– oh hisse, oh hisse ! crièrent tous les animaux !

Vous entendez dit la reine en regardant les enfants, les cris ça encourage !
Mais, on aurait dit que les enfants ne pouvaient toujours pas dire un mot plus haut que l’autre. Ils souriaient en silence. L’âne eut encore beaucoup de peine et après bien des efforts, enfin les bottes des filles et des garçons furent dégagées et tous purent recommencer à sauter dans les flaques d’eau. Cela faisait très plaisir à tout le monde et c’est alors que sous les encouragements des grenouilles, des lapins, des oiseaux, des libellules et de l’âne Martin… les enfants, tous ensemble, poussèrent leur premier cri de joie ! La reine des grenouilles était ravie de ces hurlements formidables. Elle était certaine maintenant d’entendre les enfants se promener et de ne plus avoir plus peur de se faire aplatir les fesses !
Lorsque les mamans et les papas sursautèrent au vacarme que faisaient leurs chers enfants, ils se sentir aussi très heureux. C’était ça qui depuis longtemps leur manquait ! Ils réalisèrent que grâce aux animaux les enfants avaient poussé leurs premiers cris de joie. Alors, ils s’arrêtèrent de travailler pour tous les rejoindre et les applaudir. En les regardant sauter dans les flaques d’eau, tous les parents se disaient qu’ils étaient vraiment très heureux de s’être mariés et d’avoir des enfants ! Et ils jurèrent aux animaux de toujours prendre soin d’eux.

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6 commentaires

  1. J’aimerais redevenir un enfant pour lire vos contes en ce temps-là.

    Mais il n’est jamais trop tard est une expression qui (en l’espèce)….se justifie bien.

    Merci

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